Colloque du RMT SPICEE - mars 2024

Comment mobiliser les interactions culture-élevage, à différentes échelles, pour rendre l’agriculture plus résiliente face au changement global ?

Le colloque aura pour vocation de conforter la dynamique d'échange actuelle sur les systèmes culture-élevage en impliquant les acteurs scientifiques, professionnels, de formation et du conseil, ainsi que les organismes institutionnels.

Un appel à communications est lancé autour de 3 thèmes :

  • Thème 1 : Déployer une économie circulaire entre filières animales et végétales à l'échelle du territoire : rêves, réalités, conditions de mise en œuvre
  • Thème 2 : Construire et évaluer les systèmes qui couplent cultures et élevages
  • Thème 3 : Utiliser des outils et méthodes originales dans l’enseignement et le conseil pour accompagner la diversité des formes d’intégration culture-élevage

Deux formats sont proposés :

Communications orales

Témoignages sur des initiatives et expériences individuelles ou collectives, avec une diversité de formats attendus (vidéos, démonstrations d’outils…)

Ce colloque est à destination des conseillers, des formateurs et des scientifiques du monde agricole ainsi qu'aux gestionnaires et acteurs publics qui se questionnent sur les systèmes agraires à promouvoir dans leur territoire. Il est aussi ouvert aux agriculteurs porteurs d’initiatives ou qui se posent des questions sur l’évolution de leur système de production. Toute expérience de polyculture-élevage, à l'échelle de la ferme ou du territoire en France, dans l’Union Européenne ou dans les pays du Sud est la bienvenue.

 

 

Les systèmes agricoles sont confrontés à l’intensification des conséquences du changement climatique et de l’érosion de la biodiversité : hausse plus rapide des températures en Europe par rapport au reste du monde, fréquence accrue des sécheresses agricoles, dysfonctionnements écosystémiques à l’échelle des paysages, des espèces (pollinisateurs) et des sols... Simultanément, l’épuisement des ressources non renouvelables fragilisent des systèmes dépendant fortement des intrants exogènes à l’exploitation et/ou aux territoires (énergie, produits phytosanitaires, matières premières protéiques importées, engrais azotés…). La rareté croissante et la hausse des prix de ces ressources en lien avec des aléas météorologiques plus fréquents et les tensions géopolitiques déstabilisent les marchés.

L’émergence de ces nouveaux enjeux pose la question de la relocalisation des cultures et de l’élevage et des modalités de leurs interactions depuis la ferme où la gestion des ressources fourragères, alimentaires, fertilisantes, énergétiques… est assurée par une ou plusieurs personnes, jusqu’à des niveaux supérieurs d’organisation impliquant des collectifs d’agriculteurs, voire une diversité d’acteurs quand il s’agit de dynamiques qui émergent à l’échelle de territoires.

Le Réseau Mixte Technologique (RMT) SPICEE (Structurer et Produire de l’Innovation pour les Cultures et l’Elevage, Ensemble) rassemble des acteurs de la recherche, de la formation et du développement (RFD), issus d’horizons divers, pour construire une vision partagée des formes d’interactions culture-élevage. Ce RMT vise à fédérer des projets et actions et à faciliter la diffusion des nouvelles connaissances. Le RMT organise un colloque national qui vise à partager ces connaissances.

Les nombreux travaux en cours, sur les interactions entre cultures et élevage, à l'échelle de la ferme ou du territoire, traitent notamment des compétitions entre alimentation animale et humaine, production alimentaire et production d’énergie. Ils portent aussi sur les méthodes de co-conception et d’évaluation de ces interactions tant sur les performances techniques et économiques, que sur le travail induit et les compétences requises. Ils traitent enfin de nouvelles manières de transmettre le savoir reposant sur une approche systémique.

Ce colloque a pour ambition de porter à la connaissance de la RFD les avancées des études sur les freins et les ressorts au développement des systèmes associant cultures et élevage, et les compétences diversifiées pour faire face aux enjeux cités précédemment. Il fera également le point sur les limites des connaissances actuelles et les nouvelles questions à traiter tant au niveau technique qu’organisationnel.

Thème 1 : Déployer une économie circulaire entre filières animales et végétales à l'échelle du territoire : rêves, réalités, conditions de mise en œuvre

L’économie circulaire, portée par les politiques publiques, vise une réduction importante de l’utilisation des ressources non renouvelables, en organisant le bouclage des flux de matière et d’énergie. Elle implique une reconfiguration des systèmes de production et de consommation qui favorise les synergies entre filières animales et végétales, en lien croissant avec d’autres secteurs d’activité.

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Sa mise en œuvre et son évaluation se heurtent cependant à de nombreuses difficultés et à des concurrences potentielles entre usages des biomasses (alimentation animale, humaine, biomatériaux, production d’énergie…). Elle se traduit aussi par des dynamiques d’acteurs qui agissent à des échelles variées (collectifs d’agriculteurs, coopératives, plans alimentaires territoriaux, périmètres d'appellation des signes officiels de la qualité et de l'origine…).
Les intervenants apporteront des éléments sur la caractérisation et l’évaluation du bouclage des cycles et de l'autonomie alimentaire et énergétique à l'échelle de territoires d’emprises diverses. Ils mettront en avant les performances en termes d’efficience, d’impacts et de services rendus, de l’intégration culture-élevage (ICE), ainsi que les analyses sur les freins et leviers au déploiement d’une économie plus circulaire fondée sur l'ICE et sur les concurrences et synergies entre usages de la biomasse.
Ils proposeront aussi des méthodologies et des témoignages pour accompagner les acteurs dans la mise en place de l’économie circulaire fondée sur l'ICE, tant au niveau des modalités d’organisation, de l’arbitrage entre différents usages, que du potentiel de relocalisation et de création de valeur ajoutée en France. Les travaux de prospectives pourront proposer une diversité de scénarios pour imaginer de nouvelles formes d'ICE. Enfin, les politiques publiques élaborent des mesures et dispositifs qui peuvent contribuer au soutien de ces différentes formes d'ICE. Elles seront évaluées en termes de bilan d’actions passées, en cours (MAEC, Plan Alimentaire Territorial, expérimentations sur les paiements pour Services Environnementaux…) et des pistes de futures mesures pourront être soumises.

Thème 2 : Construire et évaluer les systèmes qui couplent cultures et élevages

Ce thème ambitionne de proposer une vision globale des initiatives en faveur des interactions entre cultures et élevage. Un regard sera porté sur la diversité de leurs formes, les motivations de leur mise en œuvre et les propriétés et services recherchés. Que ce soit pour réintroduire l'élevage dans des zones qui n'en ont plus, pour créer des ponts entre des zones céréalières et des zones où seule la prairie est possible, ou pour maintenir les systèmes de polyculture-élevage dans des zones en cours de céréalisation ou de déprise de l'élevage, il est nécessaire de mettre au point de nouvelles méthodes de co-conception et de renouveler les critères d’évaluation des performances des exploitations et des territoires.

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Les méthodologies de conception de systèmes associant cultures et élevage développées sont aujourd'hui réinterrogées par le contexte de la crise énergétique, du changement climatique et de la perte de biodiversité. La prise en compte de ces enjeux dans la conception de ces systèmes suppose d'intégrer des dimensions telles que la réduction de la dépendance à différentes sources d'énergie et matériaux non renouvelables, aux intrants alimentaires et phytosanitaires, mais aussi l’accroissement de l'autonomie décisionnelle des agriculteurs et leur capacité à piloter la mise en œuvre de ces systèmes. Par ailleurs, une réflexion devra être conduite autour de l'échelle ou de la combinaison d’échelles la plus pertinente pour traiter de ces enjeux (exploitation, groupe d'exploitations, petit territoire) ainsi qu’autour de la vivabilité de ces systèmes, en lien avec les freins et leviers qui s'expriment à ces différentes échelles. 

La polyculture-élevage vue au travers de ses deux composantes - diversité des productions et interactions entre productions végétales et animales - est fréquemment citée comme un moyen de conserver un paysage complexe (au travers de la diversité des usages) et d'assurer un meilleur bouclage des cycles biogéochimiques, mais les critères d’évaluation associés sont difficiles à mesurer et sont souvent à mesurer sur le temps long, obligeant à repenser les indicateurs à mesurer et les façons de les mesurer. Les travaux présentant de nouveaux critères d'évaluation, des références issues d'analyse de réseaux (base de données de suivi) ou issues de simulations seront les bienvenues pour éclairer ces aspects (faisabilité, efficience, durabilité, résilience, vivabilité…).

En parallèle, les coopérations associant cultures et élevage réinterrogent les méthodes d’évaluation de ces systèmes en prenant en compte les performances individuelles des exploitations et celles du collectif, et en combinant différents outils d’évaluation à différentes échelles. Des références objectivées sur les performances permettront de mieux cerner les conditions (distance à parcourir, modalités d’organisation ou de gouvernance…) dans lesquelles ces coopérations sont vertueuses.

Les communications pourront aussi aborder la question des transitions et donc des trajectoires d’exploitation en voie de diversification ou d’intégration culture-élevage. Les conditions de succès de telles initiatives seront analysées.

Thème 3 : Utiliser des outils et méthodes originales dans l’enseignement et le conseil pour accompagner la diversité des formes d’intégration culture-élevage

L’association entre productions animales et végétales est un parent pauvre du conseil et de l’enseignement. Le conseil reste largement sectoriel : les agronomes parlent de plantes, les zootechniciens parlent d’animaux, etc. Il existe toutefois des initiatives proposées par la Recherche, la Formation et le Développement qui mobilisent des approches globales et systémiques. Accompagner les coopérations entre culture et élevage à l’échelle d’un collectif sur un territoire est un processus complexe : il faut parfois d’autres compétences que celles de la zootechnie, de l’agronomie, de l’économie, de la gestion, de la sociologie… D’autres champs d’actions et expertises peuvent être mobilisés : la géographie, la logistique, le droit…

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Il s’agit ici de mettre en lumière des méthodes originales qui décloisonnent les compétences des acteurs du conseil et de l’enseignement, afin de faire progresser des systèmes associant productions animales et végétales, qu’ils soient au niveau de l’entité exploitation, d’un collectif d’agriculteurs, ou plus largement d’une diversité d’acteurs, économiques ou non, à une échelle plus large, mais circonscrite à une zone de chalandise, à une aire d’AOP, etc. L’animation dans la durée est un autre point crucial à aborder : en effet, un turn-over rapide de conseillers ou d’enseignants, s’il peut être source de renouvellement d’idées, peut aussi affaiblir un savoir territorial (local ou non, et qui est long à acquérir). D’autre part, un accompagnement différencié peut-être nécessaire à différentes étapes de l’initiative.